Panne géante, milliards perdus en Bourse, révélations d’une lanceuse d’alerte… le lundi noir de Facebook
La société américaine est confrontée à plusieurs difficultés techniques, juridiques et politiques de manière simultanée.
Le réseau social Facebook a fait face à une accumulation d’ennuis lundi. Outre la panne qui a rendu impossible l’accès à son service principal mais aussi aux messageries Whatsapp et Messenger ainsi qu’à Instragram, Facebook a dû composer avec des accusations de monopole, une perte très importante en Bourse et une mise en cause de son mode fonctionnement par une lanceuse d’alerte et ancienne employée.
Une panne historique. Pendant six heures, Facebook et ses applications liées ont été inaccessibles lundi. Cette panne, qui serait due à un problème de routeur, c’est-à-dire de communication entre les centres de données du géant de l’internet, est une première par sa durée. Ces seules six heures ont causé un certain nombre de désordres, tant le poids de Facebook est important et va au-delà des simples communications entre particuliers. Il constitue dans certains pays un des principaux chemin d’accès à internet et ses services, et l’activité de beaucoup d’entreprises dépend de la fiabilité de Facebook.
Débat juridique sur un monopole illégal. Facebook a appelé lundi un juge fédéral à rejeter définitivement les poursuites « sans preuves valables » de l’autorité américaine de la concurrence (FTC). Il s’agit d’un des dossiers les plus menaçants contre le géant des réseaux sociaux accusé d’abus de position dominante. Facebook est accusé d’avoir accumulé beaucoup trop de pouvoir tant économique que politique et social.null
La FTC a déposé une nouvelle plainte en août, alors que sa première tentative avait été écartée par James Boeasberg, juge fédéral de Washington, la capitale américaine, en juin. Elle y soutient que Facebook a « illégalement racheté ou enterré les nouveaux innovateurs quand leur popularité devenait une menace existentielle », en référence à l’application Instagram et à la messagerie WhatsApp. Dans son dossier mis à jour en août, la FTC a fait valoir que « les réseaux sociaux personnels constituent un type de service en ligne unique et distinct », et un marché contrôlé à plus de 65% par Facebook, avec sa plateforme principale et Instagram, donc un monopole. L’agence « n’apporte aucune preuve valable pour qualifier Facebook de monopole illégal », rétorquent les avocats du groupe californien.
Le profit avant l’humain. En plus de ces difficultés, la journée de lundi était une veillée d’armes pour Facebook. Une ancienne de ses ingénieures, qui est partie en mai, doit témoigner ce mardi au Congrès, le parlement américain, contre son ex-employeur. Frances Haugen, devenue lanceuse d’alerte, a emporté des milliers de documents avec elle. Elle s’appuie dessus pour décrire un groupe où la recherche du trafic et des recettes publicitaires l’emportent sur les inquiétudes liées le rôle social de la plateforme.
« Si nous étions une société qui ne se préoccupe pas de sûreté, qui donne la priorité aux bénéfices, nous ne ferions pas ce genre de recherches », a fait valoir lundi Monika Bickert, vice-présidente de Facebook, au sujet des études internes qui montrent notamment que la santé mentale de certaines jeunes filles est affectée par Instagram. Quant à l’impact du réseau social sur le climat politique, pour lequel Facebook n’a pas suffisamment fait pour le contrôler selon Frances Haugen, Nick Clegg, un autre vice-président qui a aussi été vice-Premier ministre du Royaume-Uni au début des années 2010, a jugé dimanche « trop facile de chercher une explication technologique à la polarisation politique aux Etats-Unis ».
Concernant les annonceurs, « même si quelques marques veulent envoyer un message » et cesser de faire de la publicité sur le réseau social, « cela n’aura aucun impact dans les résultats financiers de Facebook. Facebook est trop gros pour tomber », estime Jenna Golden, spécialiste du conseil aux entreprises.
Des milliards perdus en Bourse. Toutes ces difficultés cumulées ont eu des conséquences financières. La fortune du richissime Mark Zuckerberg, co-fondateur de Facebook, a fondu de plus de 6 milliards de dollars (5 milliards d’euros) en quelques heures lundi après une chute du titre en Bourse. Poids lourd de l’indice Nasdaq, Facebook a plongé de 4,89% à 326,23 dollars (un peu moins de 272 €). Depuis ses sommets début septembre, le titre a perdu 15%. La fortune de Zuckerberg est ainsi évaluée à 121,6 milliards de dollars (101,3 milliards d’euros), en recul de 15 milliards de dollars (12,5 milliards d’euros) depuis début septembre.
Un incident qui conforte ses opposants et concurrents. La panne de lundi apporte de l’eau au moulin des détracteurs de la société californienne, car il démontre son immense emprise sur la vie quotidienne, voire professionnelle avec les contacts qu’il rend possibles, l’outil de travail qu’il constitue et les revenus qu’il permet de générer.null
Le malheur de Facebook a en tout cas fait le bonheur de ses concurrents. La messagerie Telegram est passée de la 56e à la 5e place des applications gratuites les plus téléchargées aux Etats-Unis, en un jour, selon le cabinet spécialisé SensorTower.
Les révélations de Frances Haugen ont en outre donné un nouvel élan aux nombreux critiques de Facebook, dont les quatre plateformes sont utilisées tous les mois par 3,5 milliards de personnes. Elles montrent, pour le président américain Joe Biden, que la société « ne sait pas se réguler elle-même », d’après sa porte-parole Jen Psaki. Elles « prouvent les inquiétudes (…) au sujet du pouvoir que les géants des réseaux ont amassé ».
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